Ce second volume aborde la question du « Refuge », tant en Afrique du Sud que dans les colonies anglaises et néerlandaises d’Amérique. Dès la fin du XVIIe siècle, ce sont des dizaines de milliers de personnes, nobles, soldats, pasteurs, négociants ou petites gens qui quittent le royaume de France, pour des raisons religieuses ou dans l’espoir, tout simplement, d’une vie meilleure. Certains parviennent à bâtir de formidables fortunes dans les colonies étrangères, tandis que d’autres se contentent d’y diffuser idéaux, nouvelles techniques ou pratiques cultuelles, contribuant à modeler les sociétés d’accueil sur le plan culturel. Sait-on par exemple qu’il existe encore à New York une église de langue française, héritière directe de l’installation de colons huguenots dans l’île de Manhattan (New York) au XVIIe siècle ? que les villes de New Rochelle, dans l’État de New York, et de New Bordeaux, en Caroline du Sud, ont été fondées par des réfugiés français ? que ces mêmes huguenots ont contribué au développement de la viticulture en Afrique du Sud, à partir de la région de Franschhoek, le « coin des Français » ? Que leur périple a été exploité tant par les démocrates américains que par les idéologues du Ku Klux Klan, les tenants de l’Apartheid ou les presbytériens du Brésil ? Mythifiée par les uns, méconnue par les autres, cette « histoire du Refuge » n’en constitue pas moins un puissant ferment identitaire pour les descendants de huguenots ou les communautés réformées actuelles. Ces héritages partagés, qui dépassent les frontières nationales, sont source d’une mémoire commune qui contribue depuis la fin du XVIIIe siècle à rapprocher les deux rives de l’Atlantique autour de projets fédérateurs et d’échanges croissants.