« Deffense aux François d’épouser des négresses, cela dégoûterait du service, et deffense aux noirs d’épouser des blanches, c’est une confusion à éviter ».
En 1674, l’article XX de l’ordonnance de Jacob Blanquet de La Haye, vice-roi, amiral et lieutenant pour le Roy dans tous les pays des Indes, pose clairement l’interdiction de l’intermariage à l’île Bourbon. Cette législation, ignorée dans les débuts du peuplement de la colonie, se voit renforcée par la suite lors du passage d’une société de subsistance à une société esclavagiste.
Pourtant, certains sont déterminés à « faire famille » et à déjouer les obstacles juridiques et sociaux mis en place contre ces unions interdites. C’est-à-dire rendre possible la transmission d’un héritage symbolique et matériel. Ces amours invisibles sont-ils vraiment secrets ? Au fil de l’archive, l’auteure retrouve ces familles, tolérées dans un entre-deux que révèlent les actes notariés et d’état civil, mais qui doit avant tout rester discret.
Familles transgressives, parfois gommées des mémoires, elles relatent la capacité de ces hommes et de ces femmes à résister aux modèles clivés de la société coloniale esclavagiste ainsi qu’une évidente disponibilité de l’île Bourbon (La Réunion) pour le métissage.