Ré au XVIIIe siècle est d’abord partagée entre baronnie et seigneuries, puis passe sous obédience royale. Autour du quartier maritime de Saint-Martin, elle a pour mission officielle d’être la sentinelle des pertuis. Pourtant ses habitants, nombreux et laborieux, vivent surtout de la terre, grâce au vin et au sel. Mais négociants et marchands savent tirer parti de leurs petites embarcations et des courants commerciaux qui animent le port de La Rochelle.
Gens de mer, gens de terre ? Un étonnant brassage… Les marins connaissent les affres de leur métier, fait de périls et de naufrages, mais de retour au foyer, ils bénéficient de l’invalidité, seul point qui les différencie des Rétais de la terre. Pour les laboureurs, les sauniers, voire les gens de la ville, la mer reste leur horloge : tantôt elle gronde et ravage le littoral, tantôt elle nourrit les hommes et leur sol. Bienfaits parfois, contraintes souvent, c’est le sort de toutes les îles basses.
Cette société, qui est hiérarchisée dans son niveau de vie, apparaît homogène dans ses réactions de solidarité et d’indépendance. Elle repose sur une bourgeoisie enrichie par la mer, car vivant du commerce, avec des gens de peu, les plus nombreux, paysans ou matelots, à la limite de la dépendance. Ancrés à leurs villages, ce sont des terriens de la mer, dans la vigne, le marais ou l’écluse. Asservis à la navigation, en barque ou en frégate, ils sont tout aussi ancrés aux mêmes villages. En somme des gens de la mer, proches du monde paysan qu’ils épousent dans leur existence quotidienne ; des gens de la terre, dont l’identité est faite d’un harmonieux mélange de ruralité et d’esprit marin.