La langue arabe a suivi l’islam dans sa diffusion vers l’Afrique sahélienne. L’arabisation des enseignants musulmans a permis un premier usage de l’écrit dans cette partie de l’Afrique. Le besoin est ensuite apparu de transmettre en langues africaines les fondamentaux de l’islam. On s’est alors servi des caractères arabes pour transcrire ces langues. El Hadji Samba Diallo, dans le compte rendu d’un livre de Fallou Ngom, met en évidence l’importance, dans l’histoire du mouridisme sénégalais, de la littérature en wolofal, c’est-à-dire en langue wolof écrite en caractères arabes. Le concept d’ajamisation a été appliqué à ce processus, le mot ‘ajamî désignant, en arabe, une langue étrangère, et, par extension, un texte écrit dans une telle langue en caractères arabes.
Tal Tamari présente une autre option : la traduction par voie orale du texte arabo-islamique dans une langue africaine, ici le bambara du Mali. L’exemple choisi est celui du Umm al-Barâhîn, de Muhammad b. Yûsuf al-Sanûsî (m. 1490), bien connu dans le monde musulman comme base de l’enseignement sur l’unicité divine. Le prédicateur lit le texte en arabe et le fait suivre d’une traduction et de commentaires en langue bambara.
La diffusion de la culture arabo-islamique s’est aussi accompagnée de la production de manuscrits, copies d’ouvrages arabes ou commentaires et traités locaux. La série Arabic Literature of Africa (ALA) publiée à partir de 1994 (dir. J.O. Hunwick et R.S. O’Fahey), a entrepris de les recenser. Charles C. Stewart (et al.) a publié en 2016 les deux derniers volumes de cette série, consacrés à l’aire mauritanienne (1 875 auteurs, environ 10 000 titres sur 350 ans). Constant Hamès rappelle le bilan d’ALA et fait une présentation contextualisée de ces derniers volumes. Stewart analyse, de son côté, la culture savante à Tombouctou et démontre, à contre-courant des représentations habituelles, que celle-ci n’occupe pas la première place dans la production régionale par le nombre, la profondeur historique et l’ampleur du champ disciplinaire.
Recenser les manuscrits va de pair avec le souci de les conserver. Moussa Konaté et Bourahima Bakayoko attirent l’attention sur les manuscrits arabes en péril en Côte d’Ivoire. Issouf Binaté, Yacouba Ouédraogo et Louis Audet Gosselin s’attachent, pour leur part, à la carrière des arabisants au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire, deux pays où l’islam occupe une place importante, mais non majoritaire.