Les auteurs soulignent le rôle particulier de Pierre Loti au tournant des XIXe et XXe siècles : s’ouvrant à de multiples espaces,à de multiples langues, à de multiples modes de vie, « l’œuvre monde » s’inscrit aussi dans la découverte de plusieurs histoires – et souvent de leurs bouleversements –, car cette mondialisation, d’abord géographique et politique, est aussi d’ordre culturel et donc temporel. Ce sont des chronologies, des événements historiques et des personnalités hors de l’Europe qui apparaissent, donnant à considérer souvent pour la première fois des traditions étrangères et leurs profondeurs historiques et culturelles diverses, encore méconnues ou mystérieuses. Ce ne serait pas le moindre mérite de Loti d’avoir été à la jonction de deux mondes : celui littéraire d’une Europe déclinante, celui, plus ethnologique, d’une nouvelle modernité, dont son « œuvre monde » annonce à la fois la diversité (dans un premier temps) et, pour nous (dans un second), celui de la mondialisation, de l’uniformité. Mais d’un point de vue plus général, il arrive aussi que Pierre Loti considère précisément ce qu’on désigne aujourd’hui comme la mondialisation : il évoque alors ce que nous appellerons après lui le « vertige mondial ».