En dehors des écrits sur l’histoire pré-coloniale et le bouddhisme, il est finalement peu d’ouvrages traitant de l’identité birmane. Comment les Birmans, en tant qu’individus d’une société singulière, se construisirent une identité hégémonique sur une partie des territoires de leur nation contemporaine, au sein de la multitude d’ethnies qui peuplent le pays ? Comment cette hégémonie s’acquiert et est reproduite dans la conquête de nouveaux territoires ? Des questions auxquelles l’auteur tente de répondre à travers l’étude des sociétés littorales, du delta de l’Irrawaddy au sud de la Thaïlande en passant par la région du Tenasserim. L’histoire vue par les Birmans et les représentations dominantes de leur identité ne font que peu de cas du littoral. Et pour cause, l’assise de leur pouvoir repose avant tout sur la prise de contrôle des plaines du fleuve Irrawaddy, de la maîtrise de l’irrigation et de la riziculture. Pour cette raison, les littoraux de Birmanie peuvent être considérés comme autant de frontières sociales et culturelles que les Birmans tentent de repousser et négocier en tentant de se les approprier. Les littoraux birmans sont également le lieu de relations inter-ethniques défiant la conception centralisatrice d’un repli identitaire constitutif de la société. Ainsi, l’étude des sociétés littorales de Basse-Birmanie permet de mettre en exergue des structures (la relation patron-client) et stratégies (l’exogamie) de birmanisation, qui à leur tour servent à éclairer la construction plus large d’une hégémonie dont la principale force est sa capacité d’intégration et de « recyclage » de l’altérité.